Jésus contemporain. Christologie brève et actuelle,
d’Emmanuel Durand,
Éd. du Cerf, 330 p., 18 €
Dominicain,
professeur de théologie à Ottawa (Canada), Emmanuel Durand est déjà
auteur d’une poignée de livres de théologie importants, tant par le
nombre de pages que par la qualité, tous publiés aux Éditions du
Cerf (1). À bientôt 46 ans seulement, la publication de son Jésus contemporain
fait démonstration d’une maturité théologique et pédagogique peu
commune. Ce nouveau livre, dense, solide et pour autant d’une écriture
très limpide, offre, de plus, une méditation très personnelle, sensible,
sur les « martyrs de notre temps », sur « la foule des opprimés », car « la
figure ”historique” de Jésus se rencontre tout au long de l’histoire et
dans le temps présent, à travers la foule des persécutés et des
martyrs ».
« Rencontrer Jésus d’une façon moins fictive, incarnée »
La cause est dès lors entendue : « Ceux
qui cherchent à contempler le visage de Jésus ou à dresser son portrait
ne doivent pas le chercher seulement dans les sources du passé ». Et, au-delà de l’histoire, Emmanuel Durand encourage vivement à « rencontrer Jésus d’une façon plus directe, moins fictive, incarnée »… C’est ainsi que Jésus-Christ est toujours notre « contemporain ».
Certes, il ne s’agit en aucun cas de mépriser ce que l’histoire – comme
science –, l’exégèse et la théologie spéculative peuvent apporter à
l’actualisation de la « Bonne Nouvelle ».
Le professeur au Collège universitaire dominicain d’Ottawa (Carleton
University) déroule d’ailleurs une remarquable synthèse des « portraits »
de Jésus dressés par les meilleurs historiens modernes des
commencements du christianisme, suivant de près Gerd Theissen (2),
Gerhard Lohfink (continuateur catholique du protestant Martin
Kähler) (3), ou l’exhaustif John P. Meier (4). Il rend ainsi à son
lecteur un très grand service éducatif.
De
même, toujours historien autant que théologien, Emmanuel Durand
parcourt de façon systématique l’élaboration des dogmes chrétiens sur la
nature du Fils de Dieu et sur sa situation dans la Trinité, des épîtres
de Paul à la succession des grands conciles du Ve siècle (Éphèse, Chalcédoine), en passant par les Évangiles. En deux chapitres magistraux, le lecteur est alors convié à « entrer plus avant dans la contemplation du Christ de la foi ».
C’est peu dire, en réalité, parce que l’érudition profonde du
théologien d’Ottawa lui permet de conduire son lecteur jusqu’à cette
lecture originale de Paul comme révélation que le Christ a été un « Oui à Dieu », et que cet « Amen » relève « en définitive du dessein de Dieu porté à son accomplissement en Jésus ».
La gloire de la Résurrection
Ce
n’est pas la moindre des qualités de ce livre que celle de provoquer, à
plusieurs reprises, la joie – pour ne pas dire la jubilation – du
lecteur qui est en quête d’un « Jésus contemporain »
qui s’incarne intimement en chaque homme et historiquement dans toute
la communauté humaine, qui stimule empathie et compassion, qui encourage
pardon et réconciliation, qui suscite étonnement et mystère… In fine,
Emmanuel Durand pousse sa théologie jusqu’à l’affirmation de « la gloire de la Résurrection » comme présence croissante du Christ auprès de l’humanité. Ainsi, Jésus « n’est
pas notre contemporain par le lieu et le temps de son entrée dans la
chair, mais il l’est devenu par sa gloire, sans rien perdre de la
singularité de son humanité ». Voici une façon particulièrement lumineuse d’actualiser la Nouvelle Alliance.
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